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Le 01 Mars 2023

La production de laine dans les Hautes-Alpes

Aux XIVe et XVe siècles, on filait et tissait la laine dans toutes les communautés du département des Hautes-Alpes. Aujourd’hui l’industrie textile se perpétue grâce à deux établissements : les filatures-tissages de Saint-Firmin en Valgaudemar et de Chantemerle. Plusieurs fermes ont aussi développé la fabrication de la laine grâce à leurs élevages de moutons et proposent des textiles issus de leurs troupeaux.

L’ART DE LA FILATURE

LES LAINES DU VALGAUDEMAR

La filature du Valgaudemar a été créée en 1830 à Saint-Firmin. À cette époque, les éleveurs de moutons apportaient leurs toisons brutes et repartaient avec l’équivalent en fil à tricoter pour leur permettre de fabriquer chaussettes, pullovers, flanelle à sous-vêtements, couvertures… Petit à petit, l’approvisionnement provient du monde entier et les fibres sont sélectionnées avec soin pour confectionner des fils nobles. Mais brutalement en 2018, la filature s’est arrêtée. Après une période de travaux et de réorganisation, Marie-Laure Laurent rachète la branche d’activité de filature de laines en mars 2021. Cette petite fille et arrière-petite-fille de tisseurs et imprimeurs de couvertures à Cours-la-Ville dans le Rhône se lance un véritable défi en relançant la production de laine fabriquée en France. La filature devient alors les « Laines du Valgaudemar ».

Marie-Laure Laurent – Laines du Valgaudemar ©Patrick Domeyne – ADDET05

Marie-Laure Laurent revient pour nous sur les défis qui l’attendent

Pourquoi est-ce important de faire perdurer la filature en France ?

La première raison, c’est qu’il ne faut pas perdre notre patrimoine industriel et nos savoir-faire uniques. Quand je me suis lancée, j’ai senti une vraie dynamique de la filière alors qu’il y a quelques années en arrière elle avait été délaissée suite à la récession et la désindustrialisation du pays. Mais aujourd’hui il y a un vrai partage. J’ai d’ailleurs reçu des conseils d’autres filatures quand j’ai repris l’entreprise. Nous avons aussi la chance dans le département d’avoir l’appui de l’association l’Atelier des Laines d’Europe, basée à Saint-Chaffrey et présidée par Marie-Thérèse Chaupin. J’en fais d’ailleurs partie et nous travaillons notamment sur la formation des éleveurs pour les aider dans la revalorisation de leurs laines, afin de leur créer de nouveaux débouchés de transformation. Aujourd’hui pour beaucoup d’éleveurs, la laine reste un déchet dont il faut se débarrasser. Il faut donc réorganiser les étapes et comprendre les enjeux de chacun dans la filière laines françaises.

D’où proviennent vos laines ?

Nous avons deux marchés différents. Tout d’abord, la vente de nos propres fils auprès des particuliers, à la filature ou sur notre site en ligne. Pour ces produits, nous nous fournissons en laines françaises : principalement la Mérinos d’Arles, l’Angora et la Préalpes. Nos fibres sont 100% françaises. Ensuite, nous proposons du travail à façon aux éleveurs afin de transformer leurs laines sur place. Nous travaillons par exemple dans les Hautes-Alpes pour la ferme Flouka dans Le Dévoluy. Certains éleveurs se regroupent aussi en collectifs pour faire transformer leurs laines à la filature, car nous ne pouvons pas lancer les machines pour moins de 100 kg de laine lavée.

Est-il possible de mettre en place une organisation pour récupérer les laines des différents élevages dans le département ?

C’est une réflexion que nous avons entamée. Il faudrait pour cela réorganiser toute la filière laine locale et bien déterminer les enjeux et les défis : travailler avec les éleveurs pour garantir une laine de qualité, être présent sur les chantiers de tonte, collecter la matière première, organiser le lavage, le peignage et acheminer la laine jusqu’à la filature… Cela demande une grosse organisation, mais c’est à terme quelque chose que je souhaiterais mettre en place. L’objectif serait alors d’avoir un fil pur Hautes-Alpes !

Quels sont justement vos objectifs à long terme ?

Un des objectifs serait en effet de produire un fil 100% Hautes-Alpes. Je souhaite aussi continuer à faire évoluer l’équipe pour préserver le savoir-faire et augmenter notre production, mais également développer le travail à façon avec les éleveurs. Nous sommes aujourd’hui très peu en France à maîtriser toutes les étapes de production de la fibre à la mise en pelote. Seule la teinture est réalisée par un sous-traitant, qui se trouve à moins de 300km de la filature. Nous réfléchissons d’ailleurs à un projet pour maîtriser cette étape ici à Saint-Firmin, avec un système de réutilisation de l’eau.

06 09 58 50 35

www.lainesvalgaudemar.com

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LA FILATURE DE CHANTEMERLE

La filature de Chantemerle existe depuis 1860. En 1905, la famille Blanchard construit un nouveau bâtiment et l’usine prend de l’ampleur. Elle tournera à plein régime pendant les deux guerres mondiales mais la concurrence des matières synthétiques et polyamides après 1945 causera sa fermeture en 1968. 8 ans plus tard, en 1976, la coopérative « Longo Maï » rachète la filature à Monsieur Blanchard, qui leur montre les rudiments du travail de la laine sur les machines d’origine. Aujourd’hui, la filature a surmonté la crise du textile et tourne toujours, en développant la vente directe, en créant des méthodes de production plus humaines et en produisant des vêtements qui ont du sens, durables et sans polluants. Élevage de brebis Mérinos, tonte, tri et lavage de la laine brute, production d’électricité hydraulique pour l’usine, cardage, filage, tissage, tricotage, apprêtage des tissus, confection de vêtements et commercialisation : la coopérative maîtrise toutes ces étapes.

Filature Chantemerle -©Entre 2 Poles

Alma, filatrice et trieuse de laine pour la coopérative Longo Maï nous explique le fonctionnement de leur filature

Votre système de coopérative permet d’avoir quels avantages au niveau du fonctionnement de l’entreprise en général ?

Nous sommes au total neuf intervenants avec des activités agricoles différentes. Cela nous permet de tourner pour faire fonctionner la filature. Nous sommes aussi en lien avec d’autres coopératives agricoles Longo Maï en France et en Europe, notamment celles d’où provient la laine.

En effet vos laines proviennent des élevages des coopératives Longo Maï mais également d’autres élevages de France et même d’Europe pour disposer de laines complémentaires. Serait-il envisageable de récupérer les toisons des élevages haut-alpins ?

Aujourd’hui, nous utilisons entre 10 et 15 laines différentes, dont 4 proviennent de nos coopératives en France, en Allemagne, en Suisse et en Autriche. Selon les races nous essayons de nous fournir en France. Mais certaines sont de moins en moins élevées dans l’hexagone, comme la Noir du Jura, pour laquelle nous devons nous fournir en Suisse et en Autriche. Nous utilisons les couleurs naturelles de la laine pour confectionner nos produits, nous avons donc besoin de laines de couleurs naturelles différentes pour les réaliser. Concrètement, au sein de notre coopérative, nous n’avons pas la capacité aujourd’hui de récupérer les toisons des élevages haut-alpins. Nous produisons pour notre vente mais nous ne pouvons pas faire de travail à façon, c’est-à-dire réaliser une partie de la transformation de la laine à la demande d’un éleveur. Mais c’est une vraie problématique. La laine est aujourd’hui considérée comme un déchet du fait du de la tonte qui est souvent plus élevé que le prix de vente de la laine. De notre côté, nous cherchons à rémunérer au mieux les éleveurs. Ils réalisent un vrai travail pour avoir une bonne qualité de laine. Lorsque nous nous mettons en relation avec eux, nous essayons de valoriser au mieux leur travail.

Dans une industrie hyper concurrentielle et mondiale, comment réussissez-vous à tirer votre épingle du jeu ? Est-il possible dans ce monde capitaliste de résister avec des valeurs plus humaines et sociales comme les vôtres ?

Notre autonomie est clairement un atout indéniable. Tous les produits sont réalisés sur place, excepté un seul. Et au fil des années, nous avons créé un rapport, un lien humain avec les éleveurs et les tondeurs. Depuis la COVID, nous réalisons une partie de nos ventes sur internet mais nous privilégions la vente sur les foires et les marchés et à notre magasin pour garder le contact humain. Nous tournons essentiellement en PACA mais nous nous rendons aussi sur un événement dans la Creuse et nous partons en tournée en Suisse.

04 92 24 04 43

filature-longomai.org

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L’ATELIER LAINES D’EUROPE
L’Atelier Laines d’Europe est une association basée à Saint-Chaffrey. Elle agit pour développer, promouvoir et valoriser la production et la transformation des fibres naturelles d’Europe dans le cadre d’entreprises individuelles ou collectives, artisanales ou agricole. Elle cherche à obtenir dans ce but les appuis techniques et scientifiques appropriés pour développer les actions de formation et d’informations nécessaires. 04 92 25 71 88 – atelierlainesdeurope.eu

DE L’ÉLEVAGE À LA FIBRE TEXTILE DANS LES FERMES

LA MAISON DES BÊTES À LAINE À CERVIÈRES

Bernadette Brunet – La Maison des Bêtes à Laines ©Patrick Domeyne – ADDET05

Pierre et Faustine sont les exploitants de la « Maison des bêtes à laine » à Cervières. Le couple a récemment repris l’exploitation familiale des parents de Pierre : Jean-Pierre et Bernadette. Cette ferme permet de découvrir la vie d’un troupeau de moutons en altitude ainsi que les métiers d’éleveur et de berger. Mais cela ne s’arrête pas là. Ils utilisent également la toison de leurs moutons pour produire une jolie laine de race Pré-Alpes du Sud, appelée Laine de Cervières. Elle est lavée en Haute-Loire, puis cardée, filée et teinte dans la Creuse avant de revenir à la « vente en direct de la ferme ». Et pour comprendre toutes les étapes, Bernadette partage sa passion et fait découvrir les différentes phases de « la toison au fil » dans la salle de visite au-dessus de la bergerie. La ferme pédagogique se visite donc pour petits et grands, n’hésitez pas à venir la découvrir.

06 95 13 05 07

06 75 97 82 77

www.lamaisondesbetesalaine.com

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FLOUKA, LA LAINE 100% MÉRINOS DANS LE DÉVOLUY

FLOUKA ©OTDevoluy

La ferme Flouka, c’est avant tout une histoire de famille. La passion de l’élevage relie en effet 6 générations, qui ont chacune laissé leur emprunte. C’est aujourd’hui Sébastien Arnaud qui est à la tête de l’exploitation et s’occupe de l’élevage. Il est épaulé par sa sœur Séverine, en charge du développement de la fabrication et de la production de laine à tricoter, qui a débuté en avril 2017. Leur laine est tondue sur place, lavée sans produits chimiques et filée en France. La laine mérinos est la plus fine de toutes les laines, par la finesse de sa fibre qui s’utilise notamment pour la layette. La ferme propose à la vente des kits de tricot, de la laine à tricoter, mais également des bonnets, snoods, couvertures bébés, plaids, couettes mérinos et housses en coton bio. Et si vous souhaitez vous-même concevoir des créations uniques, des ateliers laine sont aussi dispensés pour les adultes et les enfants.

06 78 86 73 75

06 58 10 36 43

www.flouka.fr

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ALPES MOHAIR, DES CHÈVRES ANGORA À EMBRUN

Alpes Mohair ©Aline Marsan

Installée depuis l’automne 2021, Aline propose de découvrir son élevage atypique de chèvres Angora et ses produits de haute qualité. Son troupeau de chèvre angora produit en effet de la laine Mohair, aux propriétés uniques, tissée ou tricotée en écharpes, bonnets, snoods, pulls, chaussettes et bien sûr en pelote. Éducatrice de formation, Aline propose aussi des visites pédagogiques de sa ferme pour faire partager son métier. Durant 1h30, elle explique les particularités de son élevage, les chèvres, la transformation de la laine et l’environnement de la ferme. grâce à des supports pédagogiques favorisant des approches environnementales, systémiques et sensorielles.

06 87 20 65 43

www.alpesmohair.fr

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LA FERME DE LA MONTAGNE À SIGOTTIER

Chèvres cachemires ©La Ferme de la Montagne

Catherine et Bernard sont installés dans un petit hameau dit « La Montagne », dans le village de Sigottier. C’est là qu’ils élèvent leurs chèvres Cachemires et Angoras pour leurs laines. Ils sont actuellement un des seuls éleveurs et transformateurs de Cachemire en France. Pour les chèvres angoras, la tonte a lieu 2 fois par an (en fin d’hiver puis en fin d’été) et elle n’a lieu qu’une seule fois pour les chèvres cachemires, en fin d’hiver. Une chèvre angora va produire 3 à 6kg de toison par an, contre 150 g environ pour une chèvre cachemire. Bernard trie ensuite les toisons à la main pour sélectionner les plus belles fibres et les trier par catégories de finesse. Plus la fibre est fine, plus elle sera douce. Une fois ce tri terminé, le mohair est contrôlé par un expert trieur au sein de la SICA Mohair. Quand tous les lots sont triés, elle les envoie chez les partenaires textiles pour la transformation. Catherine et Bernard proposent à la fois de la laine et des articles transformés par la SICA vendus sous la marque « Le mohair des fermes de France » et des articles tricotés par Catherine portant une étiquette « La ferme de la Montagne », fabriqués avec la laine « Le mohair des fermes de France ».

04 92 67 12 06

www.lafermedelamontagne.com

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DES CHÈVRES MOHAIR À LA FERME DU COL À JARJAYES

©La Ferme du Col

Les chèvres Angora de la Ferme du Col sont arrivées il y a presque 40 ans sur le plateau de Jarjayes, en provenance des Etats-Unis et du Canada. De précieux reproducteurs issus d’une sélection génétique rigoureuse ont été importés pour démarrer un élevage de grande qualité. Grâce à tout ce travail réfléchi, Cindy et Raphaël proposent aujourd’hui des produits de haute qualité, certifiés « Mohair des fermes de France ». Les chèvres sont tondues 2 fois par an, puis le mohair est trié par Cindy avant d’être envoyé à la SICA Mohair. Il est alors transformé par des artisans avant de revenir à la ferme. Le mohair est réputé comme l’une des fibres naturelles les plus luxueuses au monde : son lustre, son brillant et son toucher permettent d’obtenir des couleurs chatoyantes et durables. Le magasin propose ainsi des chaussettes, étoles, écharpes, carrés, gants, mitaines, pulls, gilets, plaids et couvertures et pour vos créations personnelles, des fils de mohair.

04 92 54 30 70

www.fermeducol.fr

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LE MOHAIR EN ARC-EN-CIEL À BRÉZIERS

Anne élève son troupeau de chèvres angoras dans les pâturages et les collines de Bréziers et selon le cahier des charges de l’agriculture biologique. Elles sont tondues deux fois par an. Une fois triées, les toisons sont transformées par « Le Mohair des fermes de France » qui regroupe le mohair de la plupart des éleveurs de chèvres angoras de France. Anne propose des pelotes de laine, des chaussettes, mais également des boléros, écharpes, carrés, bonnets, ponchos, mitaines, pulls, plaids, guêtres,

04 92 55 16 81

sites.google.com/site/annepradervand

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