
Maxime Lions, éleveur de père en fils
Maxime est éleveur de bovins et de caprins au GAEC La Muande à Châteauroux-les-Alpes depuis janvier 2014. Associé à son père Eric, qui a créé la structure en 1992, il sera dans quelques années accompagné de sa femme Sabrina, qui intègrera l’aventure familiale.
KESAKO ?
Les bovins destinés à la production de viande proviennent soit de troupeaux allaitants soit de troupeaux laitiers. On appelle « allaitant », le troupeau dont la vache élève son veau jusqu’à l’âge d’au moins 6 mois.
Maxime, présentez-nous votre exploitation agricole
Mon père s’est installé à Châteauroux-les-Alpes en 1992 avec des vaches allaitantes. Il a tout créé lui-même et quand je l’ai rejoint en 2014, nous avons ajouté un atelier caprin de chèvres laitières. Aujourd’hui nous sommes associés et nous avons 50 vaches Charolaises, destinées à la viande et entre 130 et 150 chèvres pour la production de lait.
Avez-vous toujours voulu devenir agriculteur ?
D’autant que je me souvienne, j’ai toujours voulu faire ça ! Mes grands-parents étaient agriculteurs, mon père aussi, mon frère a une exploitation de brebis et mon oncle est maraîcher… on peut dire que c’est une histoire familiale !
Comment sont élevés vos animaux ?
Les Charolaises sont dociles, elles s’adaptent facilement et produisent une viande de qualité. L’été, elles sont en montagne à l’alpage du Distrois à Châteauroux-les-Alpes ou à Risoul. Au printemps et à l’automne elles basculent dans les parcours d’inter-saison à proximité de la ferme et de décembre à début mai, elles sont à l’abri dans nos bâtiments. Les chèvres quant à elles, sont toute l’année dans nos bâtiments pour éviter la prédation. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons choisi des chèvres plutôt que des brebis car elles peuvent rester à l’intérieur.




En dehors des périodes en alpage, les vaches mangent 80% de ce que l’on produit. On vise l’autonomie mais c’est compliqué car il y a peu de terres labourables. Néanmoins, nous allons le devenir progressivement en fourrage, grâce à l’arrivée de l’irrigation sur l’exploitation.
De l’élevage, il faut ensuite passer à la transformation. Comment se déroule cette partie du travail ?
Pour ce qui est des bovins, une partie des veaux et 90% de nos vaches sont destinés à la vente directe en colis. Ils sont transportés à l’abattoir de Gap avant d’être découpés par un boucher à Saint-Crépin. Les mâles quant à eux, partent en engraissement en Italie et quelques-uns sont gardés pour la reproduction. Nous proposons des colis de viande 100% locale, tous les mois de l’année, avec 3 conditionnements différents que nous vendons sur place ou que nous livrons, avec du rosbif, de la viande hachée, du bourguignon, de la bavette, du pot au feu, des pièces à griller… Ceux qui viennent chercher leur colis sur place les mercredis, peuvent en même temps visiter la ferme.
En parallèle, le lait produit par les chèvres est directement livré à la Fromagerie de Château-Queyras, pour fabriquer ensuite du Bleu de chèvre, de la Tomme de chèvre, ainsi que des fromages de mélanges. Nous sommes 10 producteurs à fournir notre lait à la fromagerie et parmi ces 10 producteurs, nous sommes 4 gérants à diriger la société, dont je fais partie. Cette forme de coopérative demande beaucoup de travail car nous devons prendre toutes les décisions, mais en contrepartie nous n’avons pas d’actionnaires privés qui décident à notre place. Nous fixons entre nous le prix du lait qui est forcément en adéquation avec le chiffre d’affaires que nous réalisons. Mais nous avons une responsabilité au niveau salarial et commercial. Nous avons la chance d’avoir des salariés qui connaissent bien leur métier, ce qui permet une bonne coordination des tâches. La fromagerie progresse chaque année, grâce notamment aux médailles remportées au concours national agricole, mais également au travail engagé pour l’attribution de l’AOP Bleu du Queyras. Tout cela tire tout le monde vers le haut. C’est le modèle le plus vertueux pour les agriculteurs, mais il faut des personnes qui s’impliquent pour que cela fonctionne. C’est une entreprise à taille humaine, nous n’avons pas de grosses chaînes de production et nos clients sont en majorité des particuliers. L’objectif est de vendre au maximum à notre magasin, directement aux consommateurs. Tout le résultat de l’entreprise est réparti ensuite entre les producteurs et les salariés.
Le monde agricole a récemment fait entendre sa voix. Quel est le contexte du métier aujourd’hui par rapport à vos débuts ?
Chaque année, notre chiffre d’affaires augmente, mais les charges aussi ! La ferme a un bon équilibre, mais il ne faudrait pas 2 mauvaises années à suivre. On essaye toujours de s’améliorer, on fait de plus en plus de vente directe, mais au final, le matériel est devenu inabordable, l’alimentation du bétail aussi… le montant des charges fait peur ! Après, dans les Hautes-Alpes, il y a une bonne dynamique, on a beaucoup de jeunes qui s’installent. Mais nous avons des amis dans d’autres régions pour qui c’est très compliqué. Ils sont même démoralisés. Disons que n’est pas encourageant de mieux faire les choses, quand de l’autre côté on nous grignote toujours de la marge.
Éric quel est votre avis sur le sujet, en tant qu’éleveur depuis plus de 30 ans, mais également en tant que président de la Chambre d’Agriculture des Hautes-Alpes ?
L’élevage a énormément évolué dans notre département, avec notamment la prédation qui a remis en cause beaucoup de pratiques, y compris dans notre façon de fonctionner sur la ferme. Nous avons dû nous adapter. Mais nous sommes tout de même dans un contexte départemental où l’élevage est dans une bonne dynamique. On travaille aujourd’hui sur des signes officiels de qualité qui tirent vers le haut toutes les filières, comme pour l’AOP Bleu du Queyras pour la filière laitière par exemple. On constate qu’entre le moment où l’on a commencé à y travailler il y a plus de 6 ans et aujourd’hui, nous sommes passés de 40 tonnes à plus de 200 tonnes de fromages produits. Sur la viande bovine, il y a aussi eu un travail effectué sur le label Rouge viande bovine avec la marque « Patur’Alp », sous laquelle est commercialisée la viande bovine produite par les éleveurs des Hautes-Alpes et des Alpes de Haute-Provence. Elle permet notamment de mieux rémunérer les agriculteurs des Alpes du Sud, mais également d’assurer une traçabilité et une qualité des produits pour les consommateurs.



