# Plus2Histoire
Le 01 Mars 2023

Histoire de La Schappe à Briançon

Philippe Delmas, guide conférencier au service patrimoine de la ville de Briançon, nous embarque dans l’histoire de la Schappe à Briançon, première usine textile dans les Hautes-Alpes.

D’où vient le nom « La Schappe » ?
La schappe désigne le produit obtenu par traitement des déchets de soie qui peuvent être très variés. En effet, en raison de son coût, la soie a très vite suscité des efforts pour l’utilisation des déchets. Pour obtenir 12 kg de soie, on produit 14 kg de déchets et la récupération de telles quantités a forcément tenté les industriels.

Quand l’usine de la Schappe a-t-elle été créée et comment le choix de s’installer à Briançon a-t-il été décidé ?

L’histoire de la Schappe débute dans un premier temps à Saint-Véran. Entre 1830 et 1835, l’aîné des frères Mathieu se rend dans le Piémont et visite une carderie de soie. À son retour, il convainc son frère et son père de se lancer dans le travail de la soie. Mais il a vite fallu chercher un endroit où l’on pouvait trouver du charbon, mais également de l’eau pour nettoyer les déchets et faire tourner les machines et, bien entendu de la main d’œuvre. À Briançon, la population est désœuvrée en hiver (les stations n’existaient pas encore) et ce nouveau travail lui permet d’arrondir les fins de mois. De plus, l’eau et le charbon y sont en abondance. Ils s’installent alors dans l’ancien couvent des Dominicains. Les débuts sont difficiles et les rentrées d’argent sont quasi nulles. Il faudra attendre 1863 pour que le nouveau bâtiment de la Schappe sorte de terre, après que l’usine ait changé de propriétaire. Elle passe de 40 ouvriers en 1845, à 700 en 1863, puis 1000 en 1870. Elle a fortement dominé à son époque le paysage économique et social de Briançon.

D’où provenait la matière première ?

Les différents déchets de soie arrivaient dans un premier temps du Piémont. Puis avec la création de la gare de Briançon en 1884, les déchets de soie ont été importés depuis l’Asie via le port de Marseille.

Quelles étapes de transformations étaient réalisées à l’usine de la Schappe ?

Le traitement des déchets de la soie implique plusieurs opérations. Seule la dernière n’était pas effectuée à Briançon. La première opération est le triage, qui était réalisé par les enfants. Ensuite viennent les étapes du dégommage qui consiste à faire macérer les déchets pour les débarrasser des matières grasses ou étrangères, puis du décreusage où ils sont passés à la lessive pour éliminer la séricine et la fibroïne. Les déchets sont ensuite lavés à l’eau, essorés, rincés et séchés, avant d’être battus pour ouvrir, adoucir et gonfler les cocons. Puis c’est l’étape du cardage et du peignage, pour démêler les cocons et séparer les fibres courtes des longues. Le produit passe alors à l’étaleur-nappeur pour transformer le ruban en nappe. Celle-ci est examinée par des ouvrières munies de pinces d’horloger qui retirent les éléments étrangers qui subsistent dans la soie. Et la réalisation finale, le filage, est exécutée à Tenay dans l’Ain.

Quelles sont les raisons de la fermeture de l’usine ?

À partir des années 30, l’industrie de la schappe connaît des difficultés en Europe. La concurrence japonaise devient de plus en plus vive en offrant ses produits à des prix trois fois moins élevés. L’arrivée de la soie synthétique qui est un produit directement concurrentiel de la schappe, achève d’affaiblir l’industrie européenne. Le 24 mai 1932, l’usine ferme en licenciant 370 personnes. Elle a ensuite essayé de travailler des fibres végétales provenant de Malaisie mais c’est un échec et l’usine ferme définitivement le 29 avril 1933.

Pour découvrir encore plus l’histoire de la Schappe :